13éme Conférence Ministérielle de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) : ENDA CACID fait le point.

La 13e Conférence Ministérielle de l’OMC s’est déroulée du 26 février au 1er mars 2024 à Abou Dhabi, aux Émirats Arabes Unis. Le Centre Africain pour le Commerce, l’Intégration et le Développement (ENDA CACID) a pris activement part à cette importante rencontre multilatérale sur les questions liées au commerce, comme lors des précédentes ministérielles. En tant que membre de la délégation du Sénégal dirigée par l’ancien ministre du Commerce, de la Consommation et des Petites et Moyennes Entreprises, Monsieur Abdou Karim Fofana, ENDA CACID a assisté aux séances de négociations et aux initiatives de la société civile.

Cette Conférence s’est tenue dans un contexte d’incertitudes quant à la relance économique mondiale après la difficile période de la COVID-19. Cet événement a été l’occasion de revenir sur les discussions déjà entamées à Genève sur de nombreux sujets et de rechercher des convergences, en vue d’aboutir à des résultats probants. 

Dans les discours d’usage, prononcés successivement par le Président de la Conférence, la Présidente du Conseil général et la Directrice générale de l’OMC, plusieurs points ont été abordés :

  • La contribution de l’OMC au développement économique et à la création d’emplois au cours de ces trente dernières années,
  • Le rapport des discussions tenues à l’OMC depuis la 12éme Conférence ministérielle de l’OMC ainsi que les progrès accomplis, notamment l’adoption, en octobre 2023, d’une décision concernant l’accès au marché en franchise de droits de douanes et sans quota pour les PMA reclassés,
  • L’accession des Comores et du Timor-Leste ainsi qu’une cérémonie de réception des instruments d’acceptation de l’Accord sur les subventions à la pêche.

Les questions traitées étaient nombreuses et variées, notamment:

Les subventions à la pêche :  les discussions à la CM13 n’ont pas permis d’aplanir les divergences concernant les dispositions additionnelles. Les points de désaccord portaient sur les subventions contribuant à la surcapacité et à la surpêche, le TSD, la notification des subventions non spécifiques au carburant, les subventions dans la zone économique exclusive (ZEE), ainsi que la définition de la pêche artisanale et de la pêche à petite échelle, entre autres.  

Malgré cette impasse, la plupart des membres ont estimé que le projet de texte proposé par le Président constituait une bonne base pour poursuivre les travaux.

L’Agriculture : s’il était attendu de la Conférence des réponses aux problèmes posés par les politiques agricoles, notamment à travers des engagements importants des membres concernant les subventions agricoles, la concurrence à l’exportation, l’accès au marché, les restrictions sur les exportations de produits alimentaires, la détention de stocks publics, et autres, les résultats se sont avérés finalement très mitigés. 

Les Ministres n’ont pas réussi à trouver de points de convergence sur les disciplines relatives à ces politiques agricoles. Néanmoins, ils ont accepté de poursuivre les travaux en vue de rendre les marchés plus équitables et plus compétitifs, tout en prenant en compte des préoccupations telles que la sécurité alimentaire en faveur des pays les moins avancés (PMA) et des pays en développement (PED).

Le Commerce électronique :  la majorité des membres, y compris le Sénégal, étaient favorables au maintien ou non du moratoire consistant à ne pas imposer de droits de douane sur les transmissions électroniques. En effet, le Sénégal, estimant qu’il n’existe pas, à ce jour, de moyen de prélever les droits de douanes sur des transmissions électroniques, plaide pour une redynamisation des travaux à l’OMC sur cette question et pour l’évaluation des pertes potentielles de recettes douanières induites par le moratoire. 

Finalement, les Membres ont convenu d’examiner périodiquement le Programme de travail sur le commerce électronique en vue de formuler des recommandations pour la CM14. Ils ont également décidé de maintenir la pratique consistant à ne pas imposer de droits de douane sur les transmissions électroniques jusqu’à la prochaine conférence.

La Réforme de l’Organe de Règlements des Différends

Les membres de l’OMC ont exprimé leur préoccupation concernant le mécanisme de règlement des différends qui connait des dysfonctionnements depuis quelques années, en raison du blocage de la nomination de nouveaux juges de l’Organe d’Appel.

A la suite des consultations menées par le facilitateur, un compromis a été trouvé, permettant l’adoption de la Décision sur la réforme de l’Organe de règlement des Différends (ORD). Les Ministres reconnaissent qu’un travail supplémentaire est nécessaire et ont exhorté les responsables à Genève à accélérer les travaux pour parvenir à un système de règlement des différends pleinement opérationnel et accessible à tous courant 2024.

Le Développement

La question du développement a pris une place importante au sein de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) afin d’accroître les possibilités commerciales des pays en développement et des pays moins avancés.  C’est pourquoi la question du développement a été largement abordée lors de la CM13. 

Malgré les efforts déployés par les membres, aucun résultat n’a été obtenu sur cette question. Néanmoins, dans la Déclaration ministérielle, les membres se sont engagés à poursuivre leurs efforts pour améliorer l’application des dispositions relatives au Traitement spécial et différencié (TSD) pour les pays en développement (PED) et les pays les moins avancés (PMA).

L’Accord sur les Aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce

En ce qui concerne l’Accord sur les Aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (Conseil des ADPIC), les travaux du Conseil ont été présentés aux Ministres lors de la CM13.

Ayant pris acte de la mise en œuvre de la décision prise lors de la CM12 concernant la dérogation de l’Accord ADPIC pour la production de médicaments et de vaccins contre la Covid-19, les Ministres ont décidé de continuer à examiner les plaintes liées à des situations de non-violation ou motivées par d’autres circonstances dans le domaine des ADPIC, en vue de formuler des recommandations lors de la quatorzième Conférence ministérielle.

Ce qu’il faut retenir de la 13éme Ministérielle de l’OMC en termes de résultats :

Les membres de l’OMC, après de longues séances de négociations, ont conclu avec succès la CM13 par l’adoption de plusieurs décisions et déclarations à savoir:

  1. L’adoption du document final dit « Déclaration ministérielle d’Abou Dhabi » traduit l’engagement des membres à renforcer le système commercial multilatéral,
  2. L’adoption d’une décision ministérielle sur la réforme du règlement des différends,
  3. L’adoption d’une décision ministérielle sur les mesures facilitant la sortie sans heurts des pays les moins avancés de cette catégorie, pour une période de trois (3) ans ; 
  4. La réaffirmation de l’engagement en faveur du programme de travail sur les petites économies ;
  5. L’adoption d’une décision concernant le Programme de travail sur le commerce électronique en vue de présenter des recommandations d’action et de maintenir le moratoire jusqu’à la 14e session de la Conférence ministérielle (CM14),
  6. La prolongation du moratoire sur les plaintes en situation de non-violation concernant l’Accord ADPIC jusqu’à la CM14,
  7. L’adoption d’une Décision ministérielle sur la réforme du Règlement des différends ;
  8. La Déclaration sur la mise en œuvre précise, effective et opérationnelle des dispositions des accords sur l’application des mesures sanitaires et phytosanitaires et sur les obstacles techniques au commerce, relatives au traitement spécial et différencié,
  9. La Déclaration sur le renforcement de la coopération en matière de réglementation en vue de réduire les obstacles techniques au commerce.

Il convient de souligner que l’élément phare de cette 13e Conférence ministérielle a été l’adhésion des Comores et du Timor-Leste à l’OMC. En outre, la Conférence a exhorté les membres à redoubler d’efforts pour redynamiser le système commercial multilatéral dans un contexte économique et géopolitique incertain.

Zoom sur la ZLECAf

Zone de Libre-Echange Continentale Africaine

Lancées le 15 juin 2015 à Johannesburg, les négociations en vue de la mise en place de la ZLECAf ont abouti à la signature de l’accord le 21 Mars 2018 à Kigali, puis à son entrée en vigueur le 30 mai 2019 après le dépôt du 22ème instrument de ratification par la Gambie.

Pour rappel, la Zone de Libre Echange Commerciale Africaine (ZLECAf) est un projet de l’Union Africaine qui vise à mettre en place un marché continental dans le but de stimuler le commerce intra-africain.